vendredi 12 février 2010
groupe FA : "La digne rage" (Rennes)
Nous avons constaté que la Fédération Anarchiste était globalement mal connue. D'une part parce que nous ne faisons pas la Une des médias, et d'autre part parce que, comme d'autres mouvements, nous sommes parfois victimes de sortes "d'images d'Epinal" qui nous collent à la peau. Clichés, stéréotypes, ... souvent fondés sur des idées reçues qui datent un peu. Voire beaucoup. Une bonne raison pour donner la parole à des groupes fédérés, et pour essayer de donner un aperçu de la diversité de ces groupes, des actions, des réalités locales. Un bon moyen de défaire aussi certaines idées toutes faites ...
Pouvez-vous nous présenter votre groupe ? (date de création, etc)
Le groupe s'est créé en mai 2009, par la volonté de compagnon-ne-s qui militaient à la FA depuis déjà quelques années, et présent-e-s entre-autre dans le milieu « squat ». Il est actuellement constitué d'adhérent-e-s FA et de camarades sans étiquettes d'organisation autre que celle du groupe. Nous mettons en avant ce principe d'autonomie des groupes qui prévaut à la FA.
Pourquoi ce nom de "Digne Rage" ?
« La Digne Rage » est une référence au mouvement zapatiste, « La Digna Rabia » était le nom des rencontres organisées fin décembre 2008-début janvier 2009 à Mexico,à San Cristobal de Las Casas et à la municipalité autonome d'Oventik à l'occasion du 25ème anniversaire de l'EZLN et du 15ème anniversaire des communautés autonomes zapatistes.
Ce nom vient du fait que le groupe est particulièrement attaché à la solidarité internationale, notamment avec les luttes d'Amérique Latine (Chiapas, Oaxaca, Pérou, Argentine...), où l'on retrouve bien souvent des pratiques de lutte chères aux libertaires et la mise en place de réelles alternatives au capitalisme ou au « socialisme » autoritaire. Une camarade s'est rendue en Argentine il y a 2 ans, où elle a rencontré des militant-e-s de la Fédération Libertaire Argentine, puis au Pérou rejoindre la communauté autogérée « Volcàn », au nord-est de Lima. Une autre camarade, également membre de l'association Esperanza, a participé à la caravane zapatiste lors de la « Sexta » (l'Autre Campagne). Enfin, un compagnon est actuellement au Mexique (pour la deuxième fois), il s'est rendu à Mexico voir les compagnon-ne-s du Collectif Autonome Magoniste (CAMA) et se trouve actuellement à Oaxaca.
En juin 2009, nous avons diffusé un tract et des affiches sur les massacres d'indigènes au Pérou. Nous avons organisé une série de projections en octobre et novembre, dans le cadre d'une « Quinzaine de l'Amérique Latine », sur l'autogestion en Argentine, le mouvement des Sans-terre au Brésil, le massacre d'Atenco et le Plan Pueblo Panama. Le 27 janvier dernier, nous avons invité à Rennes un membre de « VOCAL » (Voix d'Oaxaca Construisant l'Autonomie et la Liberté), la composante libertaire de l'Assemblée Populaire du Peuple de Oaxaca (APPO).
Nous publions également de façon irrégulière un petit bulletin sur les luttes en Amérique Latine.
Enfin, ce nom nous convenait bien, évoquant l'aspect radical mais néanmoins organisé et réfléchi de notre groupe.
Il existe déjà un groupe FA sur Rennes. On peut imaginer que vous vous êtes montés pour intervenir de façon complémentaire à ce que faisait déjà le groupe existant ... Vous pouvez nous en dire plus ?
A l'origine, les membres de « La Digne Rage » viennent tou-te-s du groupe « La Sociale ». Nous en sommes parti-e-s, pas fâché-e-s du tout, mais dans l'idée de faire autre chose, toucher un autre public.
Le groupe La Sociale se revendique plutôt anarchosyndicaliste, en militant dans les syndicats traditionnels (FO principalement). Nous sommes plus axés sur les luttes de chômeurs et précaires, de l'université, les luttes antisécuritaires, celles des squats, sur la contre-culture (musicale entre-autres), et donc évidemment sur le relais des luttes en Amérique Latine.
Mais nous travaillons régulièrement dans le cadre de l'Union Locale de Rennes avec nos camarades de La Sociale.
Le groupe s'est-il fixé des buts, des modes d'actions ?
Nous souhaitons diffuser les pratiques et la « culture » libertaire, notamment par le biais d'un infokiosk, qui doit compter maintenant une cinquantaine de brochures. Nous avons choisi ce moyen de diffusion car il permet la pratique du prix libre et du « copyleft », et donc une accessibilité à tou-te-s. Nous commençons à éditer aussi nos propres brochures (les Éditions Enragées), téléchargeables sur notre page Punx Rezo (ainsi que nos affiches et sticker d'ailleurs: http://punxrezo.net/pg/profile/ladignerage). On organise aussi souvent des projections-débats dans des bars, ce qui permet de toucher un autre public que dans des « meetings » classiques. Le groupe est évidemment présent lors des manifs et lors d'occupations. Nous nous définissons comme un « groupe de terrain »...
On organise aussi des soirées « off » (proposée par « L'Indigne Orage », section clandestine du groupe...), avec des projections de films plus ou moins situationnistes...Ça fait parti de l'aspect « décontracté » du groupe, qui est aussi une de nos principales caractéristiques (on vous expliquera aussi, mais en privé, ce qu'est le « mandat apéritif »...)
On pourra aussi nous croiser souvent hors de Rennes, comme lors de la manif anticarcérale de Poitiers (une manif catastrophique, mais qui nous a permis de rencontrer le groupe « Pavillon Noir » de la FA, avec qui nous sommes en contact régulier...), dans des lieux alternatifs d'autres villes (à Caen par exemple) ou dans d'improbables squats anarchopunks ruraux...Dernièrement nous avons tenu notre infokiosk lors du concert punk/hardcore en soutien aux copains du groupe de Vannes...
Quel est le paysage politique à Rennes ?
Nous évoquerons ici seulement le paysage « libertaire ».
A part l'UL FA, il y a également un groupe AL, avec qui nous nous entendons bien. Nous travaillons également avec la CNT 35 (à laquelle un des camarade du groupe est syndiqué), notamment sur le terrain de l'antirépression (le Sound System du 30 janvier dernier, que nous organisions conjointement en soutien aux inculpé-e-s de Poitiers et de Rennes a d'ailleurs été un franc succès, un grand merci au passage au « Funky Primate » de Caen et à « Dr Dracula », alias Guillaume du groupe FA Idées Noires).
Il y a aussi un gros milieu « autonome » avec qui on s'entend pas trop mal aussi (même si ce terme est peu approprié à la réalité, et porteur de fantasmes divers, même si certain-e-s s'en réclame, on parlera plutôt d'anars « sans étiquette »), notamment du fait de notre présence dans les luttes de chômeurs/euses-précaires.
On peut évoquer aussi le Collectif Antifa Rennais, auquel nous participons occasionnellement, et aussi le bon boulot que fait le DAL 35 en terme d'ouverture de logements et de pression sur la mairie et la préfecture, ou encore le GANVA (Groupe d'Action Non-Violent Antinucléaire: tout est dans le titre !).
Enfin, il y a aussi le groupe « Huch » de la CBIL (Coordination pour une Bretagne Indépendante et Libertaire).
A noter que le climat est de plus en plus oppressant à Rennes (comme ailleurs...), et pas seulement pour les militant-e-s: interdiction de manifestations, répression contre les squats, les occupations, violences policières gratuites et procès suite à la manifestation du 5 décembre (à l'occasion de la « Marche des chômeurs et précaires »), présence policière et vidéo-surveillance accrues dans le centre, rachat par la mairie de lieu de concert (le "1929" récemment...).
Existe-t-il des lieux politiquement intéressants dans votre ville ?
Malheureusement il n'existe plus de squats politiques « d'activité » à Rennes, la dernière tentative d'ouverture a duré peu de temps (La Grivèlerie). Il reste néanmoins quelques squats d'habitation.
Il y aussi une « Cantine Populaire » qui a ouverte l'année dernière et qui accueille des activités et des réunions.
Il y a aussi évidemment le local anarchiste La Commune, qui fait librairie et bibliothèque, géré par le groupe La Sociale.
Enfin, pas mal de trocsons sympas, qui nous accueillent chaleureusement pour nos projections-débats et pour les concerts (on peut citer Le Papier Timbré, Le Gazoline, La Cour des Miracles, Chez Ramon et Pedro, Le Synthi, La Bascule...).
Existe-t-il une scène musicale engagée sur Rennes ?
Rennes a toujours été une ville phare en terme de bon groupes engagés, notamment pour le punk rock. On peut citer General Strike, label, distro et organisateur de concerts (pas seulement punk d'ailleurs...), sur qui on peut toujours compter pour des événements musicaux toujours politisés et souvent en solidarité (http://generalstrike-asso.blogspot.com). Certains groupes sont clairement proches des idées libertaires et assez actifs : on peut citer les Skuds and Panic People, Mat Da Lao ou encore Heaven Sucks, et jouent souvent en soutien. Il y a aussi un bon milieu anarchopunk (on peut citer entre autres, Years of Decay). Sinon, pour les groupes plus « grand public » mais néanmoins engagés et excellents, y'a aussi Tagada Jones, Les Ramoneurs de Menhirs, ou encore les malheureusement défunts Nevrotic Explosion...
Y'a aussi quelques troquets, comme « chez Ramon et Pedro », qui accueille de sympathiques groupes de Jazz manouche: parce que y'a pas que le punk-rock dans la vie !!
Le mot de la fin ?
On aurait bien aimé causer plus, mais faut bien s'arrêter à un moment...
Donc on vous dit à bientôt, à Rennes ou ailleurs, et on va citer un petit slogan en espagnol (mais d'origine basque semble t-il...) qui nous correspond bien: « Lucha y fiesta! ».
Un leitmotiv aussi: « A force de chier dans la colle, on voit plus les affiches! » (comprennes qui pourra...)
Et aussi, pour faire plaire plaisir aux copains/copines brittophones (et sans patrie ni frontière bien sûr..): « Na doue na mestr! »
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